Réalisation Ariel Laforge
MADELEINE GAUTHIER
Membre de l'Ordre du BLeuet
Texte de Christiane Laforge
lu à la présentation de Madeleine Gauthier
au Gala de l'Ordre du Bleuet, le 7 juin 2014
Sur la grande scène d’un théâtre imaginaire céleste, elle serait la fille des dieux Héra et Zeus, née au terme du mois de Gamélion, que se disputeraient Éros, Cupidon et Valentin. Sur les planches de la réalité, Madeleine Gauthier est venue au monde à Jonquière en 1943, fille de Stanislas Gauthier, comptable, et d’Yvette Jean dont la belle voix a bercé son enfance avec les airs de la Bonne chanson. Mais, précisons-le, c’était un 14 février.
Très tôt initiée à la danse, au chant et au piano, Madeleine veut enseigner sans renoncer à l’appel impérieux du théâtre. Bachelière de l’Université du Québec à Chicoutimi, elle voue sa vie professionnelle à l’enseignement. Jusqu’à sa retraite, elle se consacre à l’éducation manuelle et technique auprès de jeunes de 13 à 21 ans souffrant d’un handicap ou ayant des difficultés d'apprentissage et d'adaptation.
Cet engagement exigeant ne l’empêche pas de mener sans retenue une double vie qui débute en 1962 au théâtre La Marmite que dirige Ghislain Bouchard. Une audition réussie lui permet d’y rencontrer des inconnus talentueux : Laurent Bouchard, Michel Dumont, Reynald Tremblay. La troupe se produit deux à trois fois par an au Memorial Hall de Kénogami. Ce sont des années fastes. La Marmite, membre de l’Association de théâtre amateur du Québec, se distingue dans plusieurs festivals régionaux et nationaux et se retrouve à Montréal pour y jouer Tête d'affiche de Reynald Tremblay au pavillon de la jeunesse d’Expo 67. Plus tard à l’UQAC, dans le sillon du père de La Fabuleuse histoire d’un royaume, Madeleine multiplie les expériences comme comédienne, assistante à la mise en scène ainsi que responsable des accessoires et des maquillages. Aux comédies des premières années, succède un répertoire plus large : Ionesco, Beckett, Goldoni, Anouilh, Michel Tremblay.
Née le jour symbolique de l’amour, Madeleine Gauthier y succombe d’autant plus volontiers qu’il a figure d’artiste. Dans le bleu de ses yeux, elle découvre un océan de formes et de couleurs qu’il a emporté avec lui de sa Belgique natale où elle fera le plus beau des voyages. La fille de Stanislas Gauthier épouse Stanislas d’Haese. Un projet de vie de 44 ans.
Stan l’initie aux arts plastiques, aux techniques artistiques et à l’histoire de l’art. Unis par le cœur, ils le sont aussi de corps et d’âme, l’un et l’autre à jamais ensemble dans la même passion des arts de la scène. Ensemble au temps des opérettes du Carnaval-Souvenir de Chicoutimi. Ensemble à la création de la Société d’art lyrique du royaume. Ensemble dans L’opéra de Quat’sous et dans Huit femmes au bénéfice d’organismes comme la Maison Isa ou Leucan. Ensemble pour la mise en scène et les décors de Vice et versa, une pièce de Ray Conney, traduite et adaptée par Michel Dumont et Marc Grégoire, produite pour le financement de l’organisme Aide-maman plus. Ensemble encore pour leur fils Didier né en 1965, leur fille Pascale née en 1969, tous les deux diplômés de l’École Nationale de Théâtre du Canada. Ces fils et fille d’artistes ont entrepris leur carrière en milieu professionnel des arts de la scène. Didier en éclairage, Pascale en régie de spectacle dans différents théâtres de la métropole. Hélas, trop tôt, Madeleine devra porter le deuil de son fils, fauché à 41 ans. Heureusement, ses bras ne connaissent pas le vide. Pascale y a déposé ses enfants de l’an 2000, Julia 12 ans et Simon 10 ans. Dans les joies et les peines, dans le bénévolat et le talent, Madeleine et Stan sont indissociables, ensemble jusqu’à qu’à la mort de son géant. En mars 2009, le cancer l’emporte sur l’appétit de vivre de cet homme imposant qui se voulait invincible.
Dans le curriculum vitae de Madeleine Gauthier, il n’y a pas de trophées, pas de prix prestigieux. Il n’y a que présence indéfectible là où elle pouvait donner son temps, sa foi et sa volonté de contribuer au développement de la culture et des arts au Saguenay–Lac-Saint-Jean.
Madeleine a participé à la création d’un spectacle du millénaire, Les écrits d’Ariane, comme comédienne et metteure en scène avec Jacinthe Boudreault. Un projet d'envergure de la Commission scolaire de La Jonquière visant à provoquer la discussion sur le problème de l'épuisement professionnel de nombreux enseignants. Les écrits d'Ariane a fait l'objet d'une tournée provinciale. Ce projet illustrait bien cette cohésion dans la double vie de l’enseignante femme de théâtre militant pour la défense des arts comme des humains. Sa vie transcende ces mots du refrain de la chanson de Jean Rabouin Fil d’Ariane :
Il y a toujours quelques portes restées ouvertes
Des oasis pour soigner les peines secrètes
Nous ne sommes pas dans ces océans des îles désertes
Il y a autour des mains qui se tendent
Quand se déclenchent les tempêtes
Membre du comité local des Jeunesses musicales du Canada, membre du Parvis, lieu de croissance humaine, spirituelle et sociale à Jonquière, membre du conseil d’administration de la Société d’art lyrique du royaume qu’elle a présidé plusieurs années, Madeleine Gauthier est surtout une importante contributrice au théâtre et aux arts lyriques du royaume.
Le 7 juin 2014
MADELEINE GAUTHIER
Comédienne, metteure en scène,
Grande contributrice au développement des arts de la scène
fut reçue membre de l’Ordre du Bleuet
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vendredi 20 juin 2014
Madeleine Gauthier sur vidéo au gala 2014
Réalisation Ariel Laforge
POURQUOI L'ORDRE DU BLEUET
L'intensité et la qualité de la vie culturelle et artistique au Saguenay-Lac-Saint-Jean est reconnue bien au-delà de nos frontières. Nos artistes, par leur talent, sont devenus les ambassadeurs d'une terre féconde où cohabitent avec succès toutes les disciplines artistiques. Cet extraordinaire héritage nous le devons à de nombreuses personnes qui ont contribué à l'éclosion, à la formation et au rayonnement de nos artistes et créateurs. La Société de l'Ordre du Bleuet a été fondée pour leurs rendre hommage.La grandeur d'une société se mesure par la diversité et la qualité de ses institutions culturelles. Mais et surtout par sa volonté à reconnaître l'excellence du parcours de ceux et celles qui en sont issus.